Quand arrive décembre, les jours commencent à sentir la cannelle, l’écorce d’orange et le chocolat. Le froid se fait pénétrant et parfois la neige vient enjoliver les paysages. Noël, indéniablement, approche… Les textes de lecture de nos matins prennent une coloration différente. Je mets l’accent sur ceux qui invitent à prendre conscience de la souffrance humaine. Pourquoi en ce temps de joie et de lumière parler des gens qui souffrent? Pour ouvrir et toucher le cœur des enfants. Les enfants ont tôt fait de comprendre qu’à Noël on reçoit, mais il leur faut également comprendre que l’on donne. Il faut apprendre aux enfants à partager, à compatir, à voir ceux qui les entourent.
Si vous êtes un habitué des manuels scolaires anciens vous avez croisé Ernest Pérochon dont on donnait régulièrement des extraits tirés bien souvent de Nêne, son roman qui reçut le prix Goncourt. Il relate dans ses récits son amour des humbles, « les cherche-pain », dans son Bocage natal du début du xxe siècle. (les Deux-Sèvres). On entend à nouveau son nom par le biais du film « Les gardiennes » sorti en salle les derniers jours. Le film de Xavier Beauvois est tiré du roman du même nom d’Ernest Pérochon écrit en 1924.
Ernest Pérochon, ancien instituteur, a aussi écrit des manuels scolaires, lesquels étaient souvent illustrés par ce géant du dessin Ray Lambert. Le texte que je vous partage ce matin est celui qui a occupé notre première semaine de décembre. Il s’agit d’un conte en six parties de Pérochon tiré du manuel « Contes des cent un matins » que l’on peut retrouver sur le site Manuels anciens. C’est un joli conte qui dépeint la grande générosité d’un petit vieux et d’une petite vieille de condition modeste. Les enfants sont rapidement touchés par les deux héros.
LA FÊTE CHEZ LE PETIT VIEUX ET LA PETITE VIEILLE
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Il y avait un petit vieux et une petite vieille qui habitaient dans une petite maison.
Ils avaient été, toute leur vie, si charitables, ils avaient tant de fois secouru les malheureux, qu’ils étaient devenus eux-mêmes très pauvres.
Ils ne possédaient plus que leur petite maison très vieille, un petit âne très vieux dans une petite écurie, une petite miche dans le buffet, une petite bûche dans le bûcher et un petit bout de chandelle dans le chandelier. Ah ! J’allais l’oublier ! Ils avaient aussi trois gouttes de pétrole au fond d’une lampe. Malgré leur pauvreté, ils étaient restés très gais. Tant que durèrent les beaux jours, ils ne se trouvèrent pas à plaindre. Mais, après la Toussaint, les jours devinrent courts et les premiers froids se firent sentir.
Un soir — c’était le 3 novembre, — il faisait noir dans la maison et il y faisait froid. Le petit vieux, qui avait de mauvais yeux, aurait voulu de la lumière pour lire son journal. La petite vieille, qui était frileuse, aurait voulu du feu. Le petit vieux, en marchant pour se réchauffer, donna du nez contre la pendule. Il dit :
« Bonne femme ! Allume ta lampe ! »
Mais la petite vieille lui mit ses doigts glacés dans le cou, ce qui le fit sursauter ; et elle dit, à son tour : « Allume ton feu, petit vieux ! » Mais ils ne voulaient allumer ni feu ni lumière, afin de ménager leur petite bûche et leurs trois gouttes de pétrole. Alors ils furent un peu tristes et allèrent se coucher.
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LA FÊTE CHEZ LE PETIT VIEUX ET LA PETITE VIEILLE Pérochon