J’aime beaucoup la verve du chercheur Michel Desmurget qui n’a pas peur de s’attaquer à tous ces monstres économiques qui se font du fric sur le dos des pauvres gens qui se fient aux titres raccoleurs sans aller chercher d’informations plus détaillées! Voilà un chercheur épris d’éthique scientifique…
Le gouvernement annonce que tous les jeunes de 5e auront des tablettes à la rentrée. Une personne de mon entourage a assisté à une journée de formation sur le sujet récemment et elle en est ressortie assez catastrophée…
A savoir, ces tablettes coûtent 600 euros par enfant. Un projet pilote a été mené sur trois ans. Ces tablettes ont rencontré d’immenses problèmes. On les a remplacées trois fois! Même les profs les plus « geek » n’ont pas réussi à régler les problèmes rencontrés après le troisième remplacement…
Aux 600 euros, il faut rajouter les frais d’installation, et le coût des bornes pour l’internet. De plus, ces bornes sont prévues pour trente élèves. Si deux classes contiguës veulent se brancher, il est probable que cela entraînera une impossibilité de connection pour la moitié d’entre eux.
Cela ne s’arrête pas là. Le projet pilote a démontré que les enfants (qui pourront apporter leur tablette chez eux) arrivent en classe avec des tablettes non rechargées ou abîmées. Quand on voit le peu de soin que prennent les collégiens avec leurs cahiers, imaginons un instant l’état des tablettes entre leurs mains…
Rajoutons à cela que la clé du professeur, sensée transmettre la leçon sur chacune des tablettes des élèves, fait parfois aussi défaut! Je laisse à penser ce que seront les cours prévus essentiellement avec le support des tablettes quand un bogue surviendra! Ah! le bon vieux manuel ne vous fait jamais défaut…
Dans quelle folie pédagogique nous entraîne-t-on avec ces mesures? On nous dit qu’il manque d’argent pour assurer une diminution du nombre d’élève par classe, et pourtant, on ne lésinera pas sur cette dépense astronomique au sujet du numérique!
Si cela n’était pas assez, et ne s’arrêtait qu’à l’aspect financier. On nous parle d’égalité des chances, d’innovation pédagogique bénéfique! Les professeurs déplorent une baisse de l’attention de leurs élèves depuis nombre d’années. L’article de Michel Desmurget sur le numérique dans le Figaro, recherches scientifiques à l’appui, assure que le numérique est préjudiciable pour le cerveau des enfants: « une abondante littérature scientifique montre que ces derniers (les écrans) ont, au-delà de trente minutes, une influence délétère majeure dans nombre de domaines dont l’acquisition du langage, le déploiement de l’intelligence, le développement des facultés de concentration, la réussite scolaire ou l’obésité. Le grand public a peu d’accès à cette réalité, en raison d’une information largement biaisée. » …
Et sur l’effet sur la concentration des enfants:
« Dans le même temps, toutefois, ils ont un effet négatif marqué sur l’attention focalisée endogène étroitement liée à la réussite scolaire (ce que les parents appellent concentration). De cela, notre Académie ne dit rien. Elle survend un bénéfice mineur et omet de mentionner une atteinte essentielle que même Microsoft a récemment dénoncée dans une étude marketing, suggérant aux publicitaires, pour optimiser leurs campagnes, de tenir compte de l’effondrement des compétences attentionnelles des «digital natives» « …
Les enfants des milieux défavorisés sont les plus exposés aux ravages du numérique:
« Les victimes, ce sont «les autres», ceux dont on nous dit chaque jour qu’ils ont été abandonnés par une école républicaine honteusement inégalitaire. L’attaque est facile. Elle omet toutefois de préciser que même le meilleur enseignant ne pourra jamais agir efficacement sur un cerveau fané, engorgé d’une perpétuelle bourbe numérique. Nul ne sait faire pousser des roses sur l’aridité d’un sable désertique. »
Et si on commençait pas une baisse des écrans pour aider réellement les élèves? Il y a malheureusement trop d’enjeux économiques pour espérer inverser la tendance.
Brune, MERCI, MERCI,j’ai déjà publié à ce sujet sur le blog et la page facebook du blog. Les inspecteurs insistent maintenant dans leurs contrôles pour savoir si l’outil informatique est utilisé, si les enfants savent utiliser une tablette…!! Je fulmine à chaque fois mais je ne me laisserai pas faire.
Les dangers des écrans sur le cerveau n’est plus à prouver et notamment sur la capacité de concentration.
les dangers du wi-fi sont avérés sur la santé de tous petits et grands…et on voit des petits bout de chou jouer avec les portables de leurs parents…
Steve Jobs ou Bill Gates le savaient bien puisqu’ils ont mis leurs enfants dans des écoles « no screen » et leur interdisaient ou limitaient très fortement l’utilisation de tous les supports numériques, trop conscients des dangers et des dépendances
L’école devrait être un des rares endroits où il ne devrait pas y avoir d’écrans ! Cela ne nuira jamais à la progression des enfants. L’école a un devoir de proposer autre chose aux enfants que ce qu’ils ont à la maison!
Tout à fait! On va tomber dans les bras l’une de l’autre pour le coup! 😀
Bonjour,
Accord total avec vous sur cette fourniture de tablettes… gaspillage financier évident, et usage peu adapté aux comportements des jeunes collégiens.
Mais beaucoup plus de nuances concernant « le numérique » à l’école… car cette génération – qu’on l’approuve ou non, c’est un autre problème – n’échappera pas, ne serait-ce que dans sa future vie professionnelle – à un usage de plus en plus accru du numérique sous toutes ses formes. Il me semble donc essentiel que l’école joue aussi son rôle d' »éveil de l’esprit critique » dans ce domaine, c-à-d.
– apprendre à réfléchir sur la fiabilité des « sources » lors d’une recherche (et je peux vous dire que, là, il y a du boulot… car ils sont prêts à gober n’importe quoi !),
– apprendre à mettre de la « rigueur » et pas seulement du « plaisir » dans l’usage de l’ordinateur, par ex. respecter la notion de droit d’auteur, les normes typographiques, la citation des sources…
– éveiller la curiosité, c-à-d ne pas se contenter de sauter sur le site n°1 en 1er écran de Google… mais apprendre à chercher avec d’autres moteurs de recherche, à croiser les informations, à prendre le temps de vérifier le sens d’un mot… (et pas seulement dans « Wikipédia » !)
– enfin, apprendre non pas seulement à « avaler » en consommateur passif d’Internet, mais à créer avec le numérique, en s’interrogeant – dès le plus jeune âge – sur le « message » qu’on veut transmettre, et en prenant en compte le/s « destinataire/s » de ce message (façon aussi de travailler le « respect » de l’autre), par ex. je pense à votre travail, très intéressant, pour le « show and tell », qui peut très bien prendre comme support un PowerPoint… voire un site type Presi… en associant la rigueur d’un contenu « travaillé » à une « mise en forme » elle aussi réfléchie. Faire créer, par ex., à un tout petit, un « mini-dictionnaire » des animaux, des plantes… c’est une façon aussi d’apprendre, en associant une image (pourquoi je choisis celle-ci et pas celle-là), l’orthographe d’un mot (et l’on peut varier la police d’écriture, les couleurs pour mettre en évidence la difficulté), en créant une petite phrase sur cet animal, en mentionnant sa nourriture, son lieu de vie… Le « carnet-répertoire » de notre enfance devenu support-écran, après tout, pourquoi pas ? L’exigence de contenu, de rigueur, de concentration peut être maintenue…
Bref, il me semble qu’entre le « oui » absolu et irréfléchi actuel (avec, en plus, des enseignants non formés !) et un « non » lui aussi absolu, il y a une route intermédiaire, qui demande un vrai questionnement sur la durée de l’usage, le choix de l’activité, l’objectif principal visé, et surtout, sur le « plus » que peut apporter vraiment le numérique dans cette activité spécifique. Et je précise que je suis une « vieille » prof formée Lettres Classiques…
Il est vrai que mon titre est assez radical! Mais dans les faits, ma pensée est assez proche de la vôtre… Mes enfants ont accès au numérique via l’ordinateur familiale. Nous en limitons le temps et essayons de l’utiliser d’abord comme outil de travail, bien que mes enfants fassent également quelques jeux (mais ce temps ne dépasse pas trente minutes dans une semaine). Je songe même à les initier à la programmation via un site très bien fait pour les enfants. J’aime beaucoup votre questionnement très juste au sujet du numérique.
Par contre, je pense qu’il existe un réel souci au niveau des écrans chez les jeunes en classe. Dans le contexte actuel du manque d’attention en classe qui est largement dû au temps incroyable que passent plusieurs jeunes sur le numérique (ordi, tablette, smartphone etc…), je me questionne malgré tout sur un enseignement qui vient rajouter du temps avec ces outils… Pour les jeunes qui passent un temps raisonnable sur ces supports, je pense que d’apprendre à les utiliser est sûrement judicieux… Il est dommage que vous ne soyez pas au Ministère de l’Education pour y apporter vos lumières à ce sujet (je voterais pour vous!!!).
Le propos de mon texte était surtout pour parler des usages immodérés des écrans – et cela touche tout de même bcp d’élèves. Mon mari en voit les ravages tous les jours au collège. Il a par classe une majorité de jeunes totalement inattentive et inintéressée par les cours… Une de ses collègues de travail s’est carrément mise à pleurer après un cours la semaine dernière quant, après avoir pris plusieurs heures à monter un cours très sympa de fin d’année (ne voulant pas faire garderie) , elle s’est heurtée à un refus de travail de la classe… Et c’est une enseignante passionnée… mais elle constate que plusieurs jeunes ne veulent plus travailler, mais ont un smartphone greffé à la main…
« même le meilleur enseignant ne pourra jamais agir efficacement sur un cerveau fané, engorgé d’une perpétuelle bourbe numérique. »
L’usage du numérique doit être vraiment reconsidéré car il fait des ravages. Seul un usage intelligent de ces outils peut être un apport en enseignement… En amont, leur usage doit être supervisé par des parents responsables…
Vos derniers mots me paraissent donner « une clé » fondamentale… Des « parents responsables » ! Quand j’osais suggérer aux parents de lycéens « en perdition scolaire » que, peut-être, éventuellement, gentiment mais fermement, seulement pendant 1 mois « pour voir », ils pourraient demander à leur ado. de laisser tout écran en dehors de la chambre pour aller dormir (voire j’osais dire « de prendre un livre » !!)… les réactions valaient leur pesant de cacahouètes ! Pire que si j’avais dit « mettez-le en pension ! « Un mélange d’ahurissement et de peur de devoir « se heurter » à l’ado. en question ! Au lieu de cours de « soutien » pour les élèves en difficultés… à quand les cours de « soutien psychologico-scolaire » pour leurs parents, obligatoires le samedi après-midi tant que le collégien ne changerait pas de comportement ?
Dernière remarque : il m’est arrivé (avec l’accord du proviseur, bien sûr), d’ouvrir ponctuellement mes cours de Seconde à 2-3 parents… (pas « un seul » car c’est traumatisant pour le bambin !) qui ne réalisaient pas vraiment les exigences nouvelles du lycée – ou en sur-ajoutaient ! Les commentaires étaient intéressants… et, curieusement, cela avait un effet sur l’ensemble de la classe !!
Quant au collège… je doute que les ETI, les cours de morale citoyenne et autres « programmes aménagés » aient un effet… et je plains sincèrement les jeunes collègues, pleins de « foi » enseignante, qui se retrouvent dans des situations comme celle que vous décrivez… Mais la responsabilité incombe-t-elle à la surcharge d’ « écrans-plaisir » fournisseurs de « bourbier numérique »… ou aux TRES nombreux autres collègues qui trouvent plus facile de « faire jouer » les élèves au lieu de maintenir la notion de travail ? L’idée de consacrer les derniers jours de classe (et avant chaque période de vacances !) à l’amusement n’est pas nouvelle… et au lycée les profs se réjouissaient même de voir leurs élèves jouer aux cartes dans la cour au lieu de monter en classe… !! Et ils se gardaient bien d’aller rameuter le troupeau, préférant boire tranquillement un café en salle des profs… Et vu qu’il n’arrivait rien aux absents scrupuleusement signalés… Si tous les profs d’un même collège adoptaient une attitude commune… mais ça me rappelle une chanson « si tous les gars du monde »… On peut rêver !
Mais que vos lecteurs se rassurent… je ne demanderai jamais une fonction quelconque dans un ministère français, j’ai déjà donné… et je me contente d’apporter mes « lumières » ici aux profs grecs qui sont demandeurs !!
tout à fait d’accord avec toi, c’est une des raisons qui m’a fait me tourner vers l’ief cette arrivée massive d’écrans à l’école.
C’est le côté « massif » des dispositions qui refroidit et ce au détriment des bases…