Chaque génération a tendance à imaginer qu’elle sait mieux que la précédente. Chacune croit que ce qui a été fait avant elle ne valait pas la révolution qu’on apporte à présent. Il en est de même en éducation. Il n’y a qu’à voir le nombre de réformes scolaires.
Nous avons tendance à imaginer qu’auparavant, les enfants étaient scotchés à leur table, apprenant bêtement par coeur sans réfléchir des notions indigestes ne servant à rien. Et on se gargarise aujourd’hui du constructivisme, où l’enfant apprend maintenant de manière intelligente et est acteur de son apprentissage. Et son apprentissage se fait, bien sûr, toujours par le biais du plaisir.
Nous serions surpris de constater que le questionnement sain que nous avons existe depuis des siècles! Il y a 4 ou 5 siècles, on se questionnait déjà chez les précepteurs, à savoir si nous devions partir de l’enfant et de son intérêt ou lui inculquer de manière extrinsèque des notions. Et il y avait deux camps! Étonnante modernité!
Il suffit de lire les préfaces des manuels scolaires des années soixante pour se convaincre que le discours d’aujourd’hui, cherchant à trouver des voies efficaces et intéressantes pour construire les savoirs des enfants, étaient déjà au coeur des préoccupations des pédagogues… Autrefois aussi, on cherchait à rendre l’apprentissage vivant et efficace. En quelle année sont nés Charlotte Mason, Maria Montessori et Célestin Freinet? En 1842, 1870 et 1896! Ce ne sont que quelques uns des grands pédagogues qui nous ont précédés. Ils ont eu à coeur l’enfant.
Aujourd’hui, nous disposons de grandes ressources pour enseigner de manière vivante. C’est sûrement la force de notre temps. Mais nous sommes aussi embourbés dans une mentalité de tabula rasa du passé. Place au constructivisme, que nous croyons avoir inventé, et faisons fi de tout ce qui nous a précédé au plan scolaire.
Je ne crois pas au constructivisme pur. Oui, bien sûr, mettre en place des expériences de découverte pour introduire une notion est positif. Cela permet de réfléchir. Mais je ne crois pas au savoir intrinsèque de l’enfant. Oui, un enfant sait parfois des choses qu’un adulte ignore, et je suis toujours ravie de dire à mes enfants qu’ils m’ont appris une chose. Mais je ne crois pas qu’un enfant puisse découvrir tout par lui-même! On peut mettre en place des conditions qui permettent d’y parvenir. Cela nourrit la réflexion autour de l’apprentissage. Mais tout ne se prête pas à la mise en place autodidacte de tous les savoirs…
Où en serait l’humanité si nous n’avions pas transmis à la génération suivante. Si chaque humain avait eu à apprendre par lui-même à faire du feu, à tailler le silex, et fabriquer la roue… on ne serait sans doute pas devant nos ordinateurs présentement. Je crois à la transmission. Transmettre est naturel et un élan vers l’autre.